Pharmaciens d'établissement: trop peu de notes dans les dossiers patients

Par manque de temps, les pharmaciens d’établissement documentent peu leurs interventions dans les dossiers patients, conclut une des rares études québécoises sur la documentation, présentée en avril dernier.L’étude réalisée de juillet à octobre 2016 sur 779 patients hospitalisés au Centre hospitalier universitaire de Montréal (CHUM) dévoile que seulement 56 % des dossiers suivis par le pharmacien ont au moins une note au dossier. Et même dans ces cas, le degré de documentation est souvent jugé minimal.Pourtant, l’article 41 du Code de déontologie des pharmaciens stipule que tous les actes accomplis dans un cadre professionnel doivent être consignés, rappelle Jean-Philippe Adam, pharmacien au CHUM et superviseur de l’étude.«Dès qu’on ouvre le dossier patient, on devrait documenter toutes nos interventions, et ce n’est pas ce qu’on fait en pratique», constate-t-il.La plupart du temps, la note qu'on trouve dans un dossier patient est consignée lors de l’admission (320). Peu de notes sont effectuées pour les suivis (154) et les congés (95). «C’est étonnant, car les pharmaciens sont impliqués lors du congé. Ils aident les médecins et les résidents à compléter les ordonnances de départ», mentionne Jean-Philippe Adam qui ajoute, qu'à leur décharge, les pharmaciens ne sont pas toujours avisés d’un congé.De plus, dans 43 % des cas, les notes ne sont pas conformes, illustre l’étude. Dans certaines documentations, la date et l’heure sont manquantes, le plan de suivi n'est pas mentionné ou il y a absence de mention de la révision des ordonnances de départ.L’impact d’un étudiantSelon l'étude, la présence d’un étudiant auprès d’un pharmacien d'établissement a un impact significatif sur le nombre de suivis au dossier. Avec un étudiant, il y avait une note de suivi dans 120 dossiers sur 779. Sans étudiant, le nombre dégringolait à 34.«Les pharmaciens forcent les étudiants à aller voir les patients et ils écrivent une note à ce moment-là. Les patients sont suivis de façon plus périodique», commente le pharmacien.Toutefois, la présence d’un étudiant ne change rien en ce qui a trait au degré de documentation (extensive, suffisante ou minimale) et au nombre de patients que suit un pharmacien.Manque de tempsSelon le superviseur de l’étude, les résultats du CHUM sont probablement le reflet d’un problème présent dans plusieurs centres au Québec et s'expliquent en partie par une charge de travail trop importante en clinique.«Plus on suit de patients, moins on dispose de temps pour documenter», souligne-t-il. En effet, sur les unités où il y avait plus de patients, le nombre de documentations extensives était plus basse que sur les autres unités, a montré l’étude.Pour améliorer le taux de documentation, Jean-Philippe Adam propose de déléguer la saisie des bilans comparatifs des médicaments aux assistants techniques, de prioriser des patients à haut risque et d’adopter des ratios patients/pharmaciens.Il suggère également de cesser la documentation dans le logiciel de la pharmacie ou de trouver le moyen d’inclure ces notes dans le dossier patient. Les auteurs de l’étude recommandent aussi d’utiliser des notes pré-imprimées et de suivre les congés à venir avec les assistantes-infirmières chef des unités cliniques.Le pharmacien croit aussi qu'il est nécessaire de créer des lignes directrices plus claires quant aux éléments à inscrire dans le dossier patient.La mise en application de ces recommandations entraînera une meilleure documentation qui permettra, au final, d’assurer une continuité des soins et de faire reconnaître le rôle du pharmacien dans l’équipe médicale, croit-on.«La documentation, c’est une preuve tangible de notre présence sur les unités de soins et de notre impact, de la pertinence clinique du pharmacien», conclut Jean-Philippe Adam qui estime que les pharmaciens se doivent de remettre en question leur pratique.

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