Drs Jean-Pierre Boucher, Madeleine Gratton et Raphaëlle Boucher: éviter les comparaisons

DOSSIER | Quand exercer devient une affaire de famille Par Mathieu Ste-Marie En effet, ce couple de médecins a un luxe que d’autres n’ont pas : ils peuvent transférer progressivement les dossiers de leurs patients à leur fille Raphaëlle Boucher, également omnipraticienne à la Clinique médicale Lanaudière, un GMF situé à Saint-Charles-Borromée. «Nous savons comme ce n’est pas facile de prendre sa retraite en laissant ses patients orphelins. La plupart des médecins essaient de transférer leurs patients à d’autres, mais ce n’est pas tout le monde qui réussit à le faire. C’est un atout pour moi que Raphaëlle soit là», mentionne le Dr Jean-Pierre Boucher, âgé de 64 ans. Lorsque Raphaëlle est devenue médecin il y a trois ans, son père lui a transféré environ 700 patients sur les 1800 sous sa responsabilité. Il y a un peu moins d’un an, sa femme lui en a transféré, à son tour, 250. «Les patients sont super contents d’être transférés à quelqu’un de la famille, raconte la jeune médecin de 30 ans. Ils ont l’impression qu’il y a une continuité. D’autant plus que je partage le bureau avec mon père, donc ils ont les rendez-vous physiquement au même endroit.» Comparée à ses parents Cette solution entraîne toutefois un défi, dit-elle, celui de la comparaison avec ses parents. «Des patients vont me dire : “Ton père ou ta mère avait l’habitude de faire ça”. Je dois leur répondre que je ne fais pas ça de cette façon.» «La médecine a évolué, il y a des choses que l’on faisait il y a dix ans que l’on ne fait plus. Par exemple, nous leur prescrivons moins d’aspirine qu’avant. Nous ne faisons plus d’examen annuel de façon systématique. Les patients vont s’ajuster», renchérit son père Jean-Pierre. Selon Madeleine Gratton, âgée de 60 ans, ce sont ses anciens patients qui ont le plus de demandes. «Ils vont davantage l’asticoter. Raphaëlle ne peut pas être une deuxième Madeleine. Elle doit leur montrer sa personnalité et établir une relation de confiance avec ses patients. C’est un grand défi», mentionne la médecin qui suit encore environ 1100 patients. Elle pourrait d’ailleurs revoir certains de ses anciens patients bientôt, car lorsque Raphaëlle quittera son poste pour un congé de maternité prévu en mars prochain, les patients de la future maman seront transférés, temporairement, à ses parents. De la médecine familiale à l’état pur. Ce qui n’est pas surprenant car l’histoire des Boucher-Gratton est intimement liée à la médecine. La maison familiale devenue clinique médicale Deux ans après avoir commencé sa pratique en 1983, Jean-Pierre Boucher a acheté la maison de famille où il a grandi sur la rue Bernard, près de l’hôpital, pour la transformer en clinique médicale. En 1986, il a recruté quelques médecins, dont Madeleine qu’il épousera par la suite et avec qui il aura quatre filles. La clinique compte aujourd’hui une vingtaine de bureaux de consultation. C’est donc dans un environnement familial où les discussions sur la médecine occupaient une place importante que Raphaëlle Boucher a grandi. Dès le secondaire 2, elle savait qu’elle suivrait la trace de ses parents. La jeune femme voit un avantage indéniable à sa situation : «Lorsque je travaillais à l’hôpital avec ma mère, je n’avais aucune crainte ou gêne de poser des questions, et ça m’a vraiment beaucoup aidée. Encore aujourd’hui, j’en pose beaucoup. Si ce n’étaient pas mes parents, je leur poserais sans doute moins de questions pratico-pratiques pour ne pas les déranger», explique-t-elle, ajoutant que leurs expériences lui apportent beaucoup. Lorsque son père prendra sa retraite d’ici quatre ans, Raphaëlle ne se voit pas lui succéder comme responsable de la clinique. Du moins pas à court ou à moyen terme. «Le volet gestion m’intéresse un peu moins. Je ne dis pas non, mais ce sera peut-être dans 10 ou 15 ans.»

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