Droits de douane américains sur les produits pharmaceutiques: où en est-on?

Les annonces américaines en matière de droits de douanes continuent d’affluer à chaque semaine, et les produits pharmaceutiques ne semblent toujours pas épargnés. Dans sa plus récente prise de parole, le 5 août dernier, Donald Trump a affirmé que la surtaxe sur les produits pharmaceutiques importés aux États-Unis pourrait atteindre progressivement 250% d’ici 18 mois. «Nous allons, d'abord, mettre un droit de douane bas sur les produits pharmaceutiques, mais, dans un an, un an et demi maximum, cela sera 150% et ensuite ce sera 250% parce qu'on veut des médicaments fabriqués dans notre pays», a déclaré le chef de l'État dans une entrevue à la chaîne de télévision CNBC.Une surenchère, alors que le président américain avait déjà menacé, il y a tout juste un mois, le secteur pharmaceutique d’une hausse de 200% des droits de douane sur les produits importés d’ici fin 2026. Par cette cascade d’annonces choc, Donald Trump entend faire baisser le prix des médicaments vendus aux États-Unis en incitant les laboratoires pharmaceutiques à relocaliser leur production en sol américain. Un ultimatum à 17 grands groupes pharmaceutiquesIl a d’ailleurs adressé une lettre en ce sens aux dirigeants des 17 principaux groupes pharmaceutiques – parmi lesquels Eli Lilly, Sanofi, Merck, Johnson & Johnson, AbbVie, Novo Nordisk, Pfizer et AstraZeneca – le 31 juillet dernier, exigeant le prix le plus bas pour les médicaments d’ordonnance vendus aux États-Unis, et demandant que les bénéfices engrangés par les groupes pharmaceutiques à l'étranger profitent aux patients et aux contribuables américains, selon Radio Canada. Donald Trump les a également exhorté à vendre les médicaments directement aux patients américains et non via des gestionnaires des prestations pharmaceutiques (PBM). Des engagements concrets de la part des industriels sont attendus au plus tard le 29 septembre par la Maison Blanche. À lire aussi: Tarifs douaniers: l’industrie pharmaceutique appelle le fédéral à soutenir les fabricantsCertains ont d'ores et déjà réagi, comme AstraZeneca, qui a annoncé en juillet un investissement de 50 milliards de dollars aux États-Unis et a déclaré qu'elle serait bientôt en mesure de produire tous ses médicaments pour le marché américain dans le pays selon The Guardian.Selon l'agence Reuters, citant un responsable de la Maison Blanche, l'administration Trump aurait par ailleurs discuté avec les fabricants de médicaments des moyens d'augmenter les prix des médicaments à l'échelle internationale afin de réduire les coûts des médicaments aux États-Unis. Un «effort collaboratif» selon Washington.Ces lettres font suite à un décret du 12 mai visant à réduire les prix des médicaments pour les aligner sur les tarifs les plus bas pratiqués ailleurs. Selon une étude de la Rand Corporation, les États-Unis payent en moyenne 2,5 fois plus pour les médicaments sur ordonnance que la France par exemple.Une menace protectionniste qui pourrait faire fuir des fabricants canadiensUne double menace que l’industrie pharmaceutique prend très au sérieux et qui, si elle venait à se concrétiser, «viendrait à ébranler le moteur économique du secteur», estime Adrien Chantraine, expert du secteur pharmaceutique de Circle Strategy interrogé par l’AFP. «Aujourd’hui, près de 75% des profits mondiaux de la pharma [sic] sont réalisés aux États-Unis et servent à financer la R&D mondiale.» Si, pout l'instant, le président américain focalise son attention sur l'Union européenne et ses entreprises, les conséquences d'une hausse généralisée des tarifs sur tous les produits pharmaceutiques importés se feront sans conteste ressentir sur le marché canadien. À lire aussi: Les coûts des médicaments brevetés ont presque doublé en dix ansAlors que les cours des actions des principales société pharmaceutiques implantées au pays ont chuté à la suite des annonces successives de Donald Trump, les fabricants pourraient «potentiellement reconsidérer la pertinence de fabriquer leurs produits» au pays, estime Shawn Bugden, doyen de l'École de pharmacie de l'Université Memorial, interrogé par RCI. Mais une délocalisation d’une partie de la production pharmaceutique signifierait à la fois un choc économique majeur et une insécurité dans l’approvisionnement en médicaments initialement fabriqués localement. Si les fabricants pharmaceutiques déplacent leurs activités à l'extérieur du pays, le Canada risque de dépendre encore plus des marchés mondiaux qu'il le fait déjà: 70% des médicaments sont importés, dont 16% des États-Unis, ce qui représente près de 9 milliards de dollars, poursuit Shawn Budgen. En outre, une hausse considérable des droits de douane aurait sans aucun doute des répercussions sur le prix final des médicaments, obligeant le Conseil d’examen du prix des médicaments brevetés à revoir ses règles de contrôle, et forçant les consommateurs à payer plus cher pour leurs traitements.

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