De l’intérêt de dépister puis de traiter l’asthme et la MPOC

Selon des données de l’Agence de la santé publique du Canada, près de quatre millions de Canadiens d’un an et plus vivent avec l’asthme et deux millions environ vivent avec une maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC). La plupart d’entre eux ne le savent pas. On estime en effet que 70% des personnes atteintes par l’une ou l’autre de ces deux conditions ne sont pas diagnostiquées. Or le dépistage et le traitement de ces patients qui s’ignorent «améliorent leur état de santé et réduisent le nombre de visites chez le médecin pour des symptômes respiratoires dans l’année qui suit le diagnostic», montre une équipe de recherche pancanadienne dans une étude publiée dans le New England Journal of Medicine.«Il s’agit de la première étude qui prouve que le traitement de ces personnes fait une réelle différence pour leur santé et leur qualité de vie», signale l’auteur principal de celle-ci, le Dr Shawn Aaron, spécialiste des poumons à l’Hôpital d’Ottawa. «Les patients ne devraient pas avoir à supporter des problèmes respiratoires chroniques», ajoute sa consœur pneumologue, la Dre Nicole Ezer. «J’encourage tous ceux qui se sentent limités par l’essoufflement dans leurs activités à demander à leur fournisseur de soins de santé de faire un test de spirométrie — la référence en matière de diagnostic — s’ils ne l’ont pas encore fait. Cette étude montre que les traitements et l’éducation des patients constituent une combinaison gagnante», souligne la professeure adjointe au département de médecine de l’Université McGill.À lire aussi: Recommandations pour la prise en charge de l'asthme léger et très léger chez les enfants et les adolescentsPour trouver des personnes souffrant d’asthme et de MPOC non diagnostiqués, les chercheurs ont eu recours à une firme de sondage téléphonique. Un appel automatisé demandait si des adultes du foyer avaient eu un essoufflement inexpliqué, une respiration sifflante, une toux prolongée ou avaient craché des mucosités au cours des six derniers mois. Les 26 905 répondants qui ont déclaré ces symptômes ont ensuite rempli des questionnaires. Les plus susceptibles d’être atteints par l’une des deux conditions ont subi un test respiratoire par spirométrie. Résultat: 595 personnes ont reçu un diagnostic d’asthme ou de MPOC, et 508 ont accepté de participer à un essai contrôlé randomisé visant à comparer différents types de soins.La moitié des participants à l’essai (253) a été assignée de manière aléatoire à recevoir des soins habituels, fournis par un médecin de famille ou par une clinique sans rendez-vous. L’autre moitié (255) a quant à elle été traitée par un pneumologue et une infirmière ou un inhalothérapeute spécialement formés en matière d’asthme et de MPOC. Les patients suivis par un pneumologue se sont vu prescrire des inhalateurs et ont appris à les utiliser. Certains d’entre eux ont reçu des plans d’action pour les aider à gérer eux-mêmes les poussées de la maladie. Si nécessaire, ils ont également bénéficié d’un traitement de sevrage tabagique, de conseils en matière d’exercice physique et de poids, ainsi que de vaccins contre la pneumonie et la grippe.Au final, 92% des patients pris en charge par un pneumologue et un éducateur spécialisé ont commencé à prendre de nouveaux médicaments pour l’asthme ou la MPOC, contre 60% des patients suivis par leur prestataire de soins primaires.Au bout d’un an, les chercheurs ont constaté des écarts significatifs entre les deux groupes. Les patients suivis par un pneumologue ont en moyenne consulté 0,53 fois par an pour des symptômes respiratoires dans l’année qui suivait le diagnostic, contre 1,12 fois pour les autres (ratio du taux d’incidence, 0,48; intervalle de confiance à 95% [IC], 0,36 à 0,63). Le taux d’hospitalisation des premiers était de 0,021 par personne-année, tandis qu’il était de 0,030 pour les seconds (rapport des taux d’incidence, 0,71; IC, 0,17 à 2,99). Idem pour le taux de consultations en soins primaires qui était moindre pour les patients pris en charge par un pneumologue — 0,36 par personne-année contre 0,91 (rapport des taux d’incidence, 0,39; IC, 0,29 à 0,53).Lire aussi: Pharmacothérapie de la MPOC stable: mises à jour des lignes directrices canadiennesAutre résultat notable: les patients suivis par un pneumologue ont vu leur score moyen au questionnaire respiratoire du St George’s Hospital augmenter de 10,2 points, contre 6,8 points pour le groupe recevant les soins habituels. «Une augmentation de quatre points signifie une amélioration de la santé et de la qualité de vie des patients», signalent les chercheurs.«En réalité, tout le monde ne peut pas consulter un pneumologue», convient le Dr Aaron. Cependant, «la bonne nouvelle, c’est que tant qu’un patient est diagnostiqué et traité, ses symptômes s’atténuent.» Dans leur étude, les chercheurs indiquent que de futurs essais pourraient tester «une stratégie de recherche de cas moins gourmande en ressources, peut-être à l’initiative des patients». Les personnes présentant des symptômes respiratoires inexpliqués pourraient ainsi remplir un questionnaire en ligne, et si leurs réponses donnent un score de risque dépassant un seuil spécifié, elles pourraient être orientées vers une spirométrie diagnostique.«De nombreuses personnes savent qu’elles doivent demander des tests de dépistage du cancer du sein et du cancer du côlon lorsqu’elles remarquent certains signes. Idéalement, elles demanderaient un test de spirométrie lorsqu’elles remarquent des symptômes de maladies respiratoires chroniques», observe le Dr Aaron, en ajoutant que «les gens n’ont pas à supporter ces problèmes respiratoires alors qu’il existe des traitements efficaces».

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