Chemin Innu: Un moment d’introspection pour la Dre Ruth Vander Stelt

«Une femme d’action et d’introspection». C’est ainsi que se définit elle-même la Dre Ruth Vander Stelt. C’est aussi ce qui a poussé la présidente de l’Association médicale du Québec à marcher 17 km du Innu Meshkenu (voir l'article Quand un médecin marche pour son peuple), le 28 février, en Outaouais. Pour une bonne cause, dit-elle…Quelle étape du Innu Meshkenu avez-vous marchée?Celle qui allait d’un lieu proche du village d’Aumond jusqu’au centre communautaire de la réserve algonquine de Kitigan Zibi, située au nord de Gatineau. Cette journée-là, il y avait sur la route environ 75 marcheurs, majoritairement autochtones. Chacun y allait à son rythme.J’ai dû réorganiser un peu ma clinique pour me libérer pour la journée, mais je l’ai fait avec joie parce que je crois profondément aux valeurs qu’incarne le Innu Meshkenu. Diverses personnalités de notre région étaient aussi en chemin avec nous*. Une résidente en pédiatrie, la Dre Raven Dumont-Maurice, et une étudiante en médecine de la région nous ont soutenus. Les deux ont été inspirées par le Dr Vollant et désirent retourner dans leur milieu pour pratiquer.Que trouvez-vous d’inspirant dans cette expérience?L’initiative même du Dr Stanley Vollant, qui constitue en soi un exemple à suivre. Voilà un médecin qui a à cœur le bien-être de sa communauté, de son peuple, et qui le montre, inspirant par ses actions les jeunes comme les aînés. Il a marché avec nous toute la journée, après son périple de 8 jours dans les bois avec les autres marcheurs, en raquettes, à monter la tente ou à dormir sous les étoiles, à faire leur popote. Derrière l’aventure du Chemin Innu, il y a aussi toute une logistique réglée comme du papier musique.L’initiative du Dr Vollant est, selon vous, une forme de leadership médical. Pourquoi?Parce qu’inspirer des gens directement, concrètement, leur donner confiance en eux et en leurs rêves, c’est cela, le leadership. Pour ce médecin, les bottines suivent les babines, littéralement. He walks the talk, comme on dit.À sa façon, ce chirurgien met aussi en relief l’importance des déterminants sociaux de la santé. Il n’attend pas que les gens viennent à lui, il va à leur rencontre. Il ne se contente pas de s’occuper des patients en bout de ligne, au pire de leur situation, mais il agit dans un esprit de prévention. En marchant, il fait la promotion d’une vie en santé et dans la nature. C’est la valeur de l’exemple vivant, sans prétention. Et puis, pour animer le tout, il y a l’élan et l’esprit de Compostelle. Et ça, ça me plaît beaucoup.Pouvez-vous préciser?La marche, seule ou avec d’autres, contribue à nourrir la santé physique, mentale, spirituelle et émotionnelle. Se mettre soi-même en mouvement, au propre comme au figuré, fait bouger les choses en soi et autour de soi. C’est un peu la magie, et le mystère, de la spiritualité routière, à laquelle participe l’être tout entier. Par ailleurs, on connaît mieux une personne quand on a marché quelques kilomètres avec elle.Avez-vous fait des rencontres en chemin?Oui, j’ai cheminé avec une jeune femme qui s’était préparée pendant cinq semaines pour pouvoir accompagner le Dr Vollant lors de son passage dans la région. Elle a perdu du poids et retrouvé énergie et espoir, me confiait-elle. En marchant, nous avons aussi commencé à parler tout spontanément de nos familles, de notre enfance.Et puis, après l’effort, le réconfort. Tous, nous avons partagé un repas, avec bannick et cipaye à l’orignal. Exquis! Il y avait aussi des moments festifs, lorsque de jeunes autochtones, par exemple, ont improvisé un drum circle, une danse rituelle. Beau, simple et inspirant. Enfin, plusieurs marcheurs avaient des pieds hypothéqués, avec ampoules et callosités. Aidé de quelques soignants, le Dr Vollant leur offrait «la clinique des pieds»...Votre bilan personnel de cette journée au grand air?Je rêve de voir se multiplier partout, et dans tous les milieux, ce genre d’initiatives, autour d’un médecin rassembleur.*Sylvie Bernier, de Québec en Forme, médaillée olympique; Gilbert Whiteduck, chef de la communauté algonquine de Kitigan Zibi; Harold Sylvain, directeur général de la Commission scolaire des Hauts-Bois-de-l'Outaouais; Sylvie Martin, directrice générale du CSSS de la Vallée-de-la-Gatineau; Pauline Fortin, adjointe à la directrice de santé publique de l’Outaouais.À lire aussi: Projet Innu Meshkenu: Quand un médecin marche pour son peuple

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