Cardio F: La santé cardiovasculaire au féminin

Très tôt dans sa formation, la cardiologue Christine Pacheco a réalisé que les femmes avaient souvent de moins bons résultats cliniques que les hommes en cardiologie. «Une femme a deux fois plus de chance de mourir d’un infarctus qu’un homme. Sur le plan cardiaque, les femmes sont sous diagnostiquées, sous-traitées et sous-évaluées», soutient-elle. Interpelée par la situation, la Dre Pacheco a entrepris une surspécialité en santé cardiovasculaire chez la femme à Los Angeles afin d’amener l’expertise au Québec. Elle est d’ailleurs la seule cardiologue au Québec à avoir cette surspécialité. Dès 2018, la médecin s’est jointe aux Dres Jessica Forcillo, chirurgienne cardiaque, Lyne Bérubé, cardiologue et Caroline Ouellet, anesthésiste intensiviste. Elles ont travaillé à mettre sur pied le centre d’expertise Cardio F du Centre hospitalier universitaire de Montréal (CHUM). «Il fallait faire quelque chose, car c’est un sujet qui nous touche en tant que femme et en tant que professionnelle de la santé», affirme la Dre Jessica Forcillo. Si le centre est né en janvier 2021, le lancement officiel a eu lieu en octobre de la même année. Le centre d’expertise comporte deux volets, soit un volet clinique et un volet recherche. Les patientes suivies par la clinique doivent être référées par un médecin et sont prises en charge par une équipe multidisciplinaire. Elles doivent présenter une maladie cardiaque établie affectant davantage les femmes ou posséder des facteurs de risque cardiovasculaires. Parmi les conditions qui touchent davantage les femmes qui sont suivies à la clinique, on retrouve les angines sans maladie obstructive, les dissections spontanées coronariennes ou encore les cardiopathies de stress, aussi connues sous le nom du syndrome du cœur brisé. Depuis l’ouverture du centre d’expertise, plus de 150 patientes des quatre coins du Québec ont été vues à la clinique du CHUM, et environ le même nombre à la clinique satellite située à l’Hôpital Pierre-Boucher à Longueuil. Premier symposium Cardio F a organisé son premier symposium le 22 septembre dernier au CHUM. Ce dernier a accueilli plus de 150 professionnels de la santé. Au menu, une journée complète de conférences portant spécifiquement sur la santé cardiovasculaire des femmes. Des conférenciers de renoms ont été invités à partager sur le sujet, dont la Dre Noel Bairey Merz, cardiologue au Cedars-Sinai Smidt Heart Institute de Los Angeles, ainsi que la Dre Michèle de Guise, présidente-directrice générale de l'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux (INESSS). De nombreux sujets ont été abordés, tels que le fardeau des maladies cardiovasculaires chez les femmes à l’échelle internationale, les impacts à long terme de la prééclampsie, du diabète gestationnel et de l'accouchement préterme sur la santé cardiovasculaire maternelle ou encore la prise d'hormonothérapie lors de la ménopause. «L’événement a démontré le vaste intérêt qu’ont les professionnels de la santé sur le sujet. La sensibilisation et l’éducation sont toutes les deux vraiment importantes pour nous, donc nous allons continuer à organiser des conférences et des événements de la sorte», affirme la Dre Forcillo. Facteurs de risques non traditionnels En plus des activités cliniques, la recherche est au cœur des activités de Cardio F. À l’heure actuelle, environ 10 projets de recherche sont en cours. La Dre Forcillo explique que l’un de ses principaux intérêts est de démystifier les facteurs de risques non traditionnels des maladies cardiovasculaires chez les femmes. «Il y a les facteurs de risque pour les maladies cardiovasculaires plus traditionnels comme le diabète, l’hypertension, le tabac ou la sédentarité. C’est le cas notamment des femmes qui ont eu de la prééclampsie lors de la grossesse, des ménarches précoces ou encore de la radiothérapie, par exemple», explique la chirurgienne cardiaque. Des travaux sont présentement en cours pour déceler des biomarqueurs chez les femmes qui ont ces facteurs de risques non traditionnels, afin d’assurer un meilleur suivi des patientes à risque de développer une maladie cardiovasculaire. Référer ses patientes Les Dres Pacheco et Forcillo invitent par ailleurs les médecins à référer leurs patientes au centre en cas de doutes. «Si vous pensez qu’une patiente manifeste des symptômes cardiaques, mais que vous n’avez pas encore aboutis à un diagnostic malgré de multiples investigations, nous pouvons aider», partage la Dre Pacheco. Il en va de même pour les patientes avec des diagnostics confirmées de pathologies cardiaques propres aux femmes, qui auraient besoin d’un suivi plus spécialisé ou encore qui pourraient participer à des projets de recherche. «Nous sommes également disponibles pour donner une opinion surspécialisée ou encore des recommandations de traitement. Si un clinicien pense qu’une de ses patientes pourrait bénéficier de notre expertise, nous sommes prêtes à les recevoir», ajoute la Dre Forcillo.

Cardio F: La santé cardiovasculaire au féminin

Pour accéder au contenu, connectez-vous ou créez un compte gratuit.

Catégories connexes