BCM au congé: les prescripteurs ne peuvent pas s’y soustraire

Dans une optique d’interdisciplinarité et de continuum des soins, le bilan comparatif des médicaments (BCM) est une étape clé pour assurer la sécurité du patient dans son parcours de soins. Il permet en effet de s’assurer que les informations concernant la médication soient transmises à toutes les équipes de soins lorsque le patient change de milieu, de l’hôpital à la pharmacie en passant par le CHSLD. Auparavant centré sur l’admission, le BCM se focalise désormais aussi sur les transferts et sur le congé. Mais cette dernière étape est parfois oubliée, volontairement ou non, par certains prescripteurs. C’est pourquoi l’Ordre des pharmaciens du Québec (OPQ) a effectué une mise à jour des politiques et procédures du BCM, publiée sur son site au mois d’avril. «Le bilan du médicament n’a reçu qu’une mise à jour mineure cette année. En collaboration avec le Collège des médecins (CMQ), nous avons confirmé et mis l’accent sur la responsabilité du médecin des ordonnances qu’il signe. Il ne peut, en aucun cas, s’y soustraire», précise dans un courriel l’OPQ à ProfessionSanté.ca. De son côté, le CMQ indique à ProfessionSanté.ca que «le rôle du prescripteur est de s'assurer que les informations sur le BCM sont adéquates» lorsque le patient change d’environnement de soins. À lire aussi: La pertinence: une solution pour le réseau de la santé, un remède contre le cynisme des médecinsIntitulée «Responsabilité du prescripteur pour le BCM au congé», cette mise à jour rappelle ainsi l’importance «que le BCM de départ mentionne l’ensemble des médicaments indiqués pour un patient afin de bien informer l’équipe de soins qui prendra la relève après son congé de l’établissement.» Cette liste à jour de tous les médicaments que prend le patient, incluant de l’information concernant son adhésion au traitement, représente le meilleur schéma thérapeutique possible (MSTP) au moment opportun de transition des soins.Alors que certains médecins sont «inconfortables à remplir certaines ordonnances ou sections du BCM», l’OPQ et le CMQ ont convenu des précisions suivantes: Si la médication en cours n’a subi aucune modification depuis l’admission et ne nécessite donc aucune nouvelle ordonnance, «le médecin traitant peut simplement attester de ce fait sans rédiger d’ordonnance». Pour tous les autres médicaments, «une nouvelle ordonnance doit être émise incluant notamment le nom du médicament, la posologie et la durée du traitement (ou la quantité prescrite et le nombre de renouvellements autorisés)».Si la médication a été arrêtée, ajoutée ou modifiée pendant le séjour hospitalier du patient, le médecin traitant peut faire signer le BCM par le membre de l’équipe de soins responsable de ce changement, ou le signer lui-même, même si la nouvelle ordonnance est hors de son champ d’expertise. «Il a alors la responsabilité de s’assurer que le suivi nécessaire à l’arrêt ou à la prise de cette molécule a été prévu (laboratoire, visite de contrôle, etc.)», précise la mise à jour du BCM.«Le médecin est responsable des ordonnances qu’il signe, il ne peut en aucun cas se soustraire à sa responsabilité», conclut le document. Une mise à jour minime, mais apparemment nécessaire, au vu de la réticence de certains médecins à prendre leur part. Le CMQ précise à ce propos que «certains médecins pouvaient être réticents car produire un BCM était long, mais maintenant le département de pharmacie peut fournir un document BCM contenant déjà plusieurs informations. Le prescripteur complète les informations manquantes.» Cette mise à jour peut d’ores et déjà être incluse dans les règlements les modalités de complétion du BCM au congé des Conseil des médecins, dentistes et pharmaciens (CMDP) des établissements. De son côté, le CMQ annonce une autre actualisation à l’été. Cette réticence avait déjà été observée dans la toute première enquête dressant un état des lieux de la pratique du BCM au Québec, publiée en 2019 dans la revue Pharmactuel. «La plupart du temps, le pharmacien participe à la réalisation du meilleur schéma thérapeutique possible (MSTP), en revanche, les médecins semblent moins s’y investir», ont ainsi observé les pharmaciens chercheurs dans leur rapport. En effet, 76,5% des médecins interrogés indiquaient ne jamais ou rarement réaliser le MSTP, et plus de 59% des pharmaciens déclaraient le faire souvent ou toujours. Ces derniers sont par ailleurs souvent responsables des BCM dans les établissements de santé selon l’enquête. «Au congé de l’usager, 59,1% des pharmaciens disent participer au BCM en préparant ou validant les ordonnances», ajoutent les chercheurs.À lire aussi: Huit façons de créer un environnement sécuritaire pour vos patientsLe BCM est généralement réalisé en trois étapes: la vérification ou la collecte de renseignements pour élaborer le MSTP, la comparaison entre les ordonnances inscrites dans le dossier et le MSTP, et enfin la conciliation des divergences identifiées précédemment avec le prescripteur. «Bien que l’objectif du bilan consiste à éviter les erreurs de médication, les buts ultimes consistent, eux, à améliorer la sécurité des patients et à réduire les complications cliniques associées aux erreurs de médication», précise le pharmacien américain Robert MacLaren, membre du Département de pharmacie clinique de l’Université du Colorado, dans une étude publiée en 2022 dans The Canadian Journal of Hospital Pharmacy.

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