Audrey Vermette: Abandonner la médecine pour recouvrer sa santé

Rares sont les médecins spécialistes qui décident d’abandonner leur carrière pour retourner sur les bancs d’école. Après avoir, pendant des années, multiplié les semaines de 60 heures jusqu'à l’épuisement professionnel, l’anesthésiste Audrey Vermette a pris cette décision pour retrouver un meilleur équilibre de vie. Pour cette mère de trois enfants de 7 à 11 ans, ce choix s’imposait pour sa santé mentale et physique. «J’ai dû me rendre à l’évidence. Un horaire comme celui que j’avais, avec des gardes de 24 heures, ce n’était pas possible pour moi à long terme. C’était un nombre d’heures inhumain. J’ai décidé pour ma famille et pour ma santé de faire autre chose», affirme la femme de 41 ans, ajoutant qu’elle «avait étiré l’élastique au maximum». Avant d’en arriver là, celle qui pouvait faire deux gardes de 24 heures en une semaine avait évalué avec ses gestionnaires la possibilité de faire passer ses heures de 60 à 45 environ. Sa demande a été refusée. En plus des longues heures de travail, les responsabilités étaient énormes. «Dans une petite journée, tu évalues, endors, réveilles et gardes en vie quatre à huit personnes. Chaque décision que tu prends à chaque seconde peut tuer quelqu’un», dit-elle. Exténuée, la médecin a donc quitté son poste à l’Hôpital d’Amos en 2016 pour faire du remplacement. Cet emploi n’était toutefois pas compatible avec son rôle de mère de famille, puisqu’elle devait souvent se déplacer à travers la province. À la fin de la trentaine, après avoir été anesthésiste pendant près de 10 ans, Audrey Vermette se retrouvait à la croisée des chemins. Elle devait faire un choix : chercher un emploi administratif en médecine ou retourner aux études. L’Amossoise a choisi la deuxième option. Un doctorat en psychologie La mère de famille a pensé un moment retourner étudier en psychiatrie, mais elle redoutait d’avoir les mêmes conditions de travail qu’en anesthésiologie. Elle s’est donc dirigée vers la neuropsychologie qui, selon elle, lui permettrait «de prendre son temps avec le patient et de le soigner comme il le faut». «Je voulais continuer à aider les gens et à prendre soin d’eux. La neuropsychologie et l’anesthésie ne sont pas si éloignées, puisque, dans les deux cas, nous travaillons avec le système nerveux et le cerveau», explique-t-elle. Depuis la naissance de ses enfants, Audrey Vermette s’intéresse à la neuropsychologie pédiatrique. Elle a d’ailleurs fait partie d’un comité de parents qui a mis sur pied une école primaire alternative publique à Amos. «Je me suis rendu compte, en baignant dans le domaine de l’éducation, que j’aime travailler avec les enfants», dit-elle. Lorsqu’elle terminera son doctorat en psychologie à l’Université du Québec à Montréal dans quelques années, elle ouvrira un cabinet où elle travaillerait avec des jeunes, assure-t-elle. «Ce n’était pas pour moi» En décidant de repartir de zéro, l’étudiante a fait une croix sur son statut, son bon salaire et des collègues extraordinaires, mais jamais elle ne s’ennuie de son travail d’anesthésiste ni de ses heures interminables, dit-elle. «Ce n’était pas pour moi. Un moment donné, il faut être honnête avec soi-même. Je n’étais plus capable de soutenir ce rythme», avoue-t-elle. Elle n'est pas la seule. «Tous les médecins sont à cran, à boutte et brûlés», constate Audrey Vermette. Elle trouve même «épeurant de voir le nombre de médecins qui songent à réorienter leur carrière» dans un groupe Facebook qu'elle a créé il y a quelques années afin de discuter de reconversion avec ses pairs. La popularité du groupe n’a d'ailleurs cessé de croître; il compte aujourd’hui près de 500 membres.

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