AMC: Des experts «frustrés» par le temps que prend la réforme de la santé à se faire

Le réformateurs du système de santé canadien savent quoi faire mais ne s’entendent pas sur la façon de le faire. Et cela doit cesser à présent.Deux experts de haut niveau ont présenté une évaluation franche du statut de la réforme aux délégués qui participaient à une séance spéciale lors de l’Assemblée de 2010 de l’Association médicale canadienne.«Le système des soins de santé est opposé au risque, a dit le Dr Jack Kitts, président et PDG de l’Hôpital d’Ottawa. Les décideurs politiques hésitent à faire quelque chose de différent, surtout si cela est fait depuis longtemps d’une certaine façon», croit-il.Après la séance, un journaliste a demandé au Dr Kitts si les Canadiens sont pessimistes à propos de la mise en œuvre de la réforme de la santé. «Je suis optimiste au sujet de ce qui doit arriver, mais frustré de notre incapacité à le faire arriver, a-t-il répondu. Le fait de me demander qui prendra soin de moi quand je serai vieux ne m’empêche pas de dormir. Je crois que le système de santé canadien saura y répondre.« Mais il est temps d’agir maintenant. Je pense que tout le monde fait de son mieux pour atteindre cet objectif. Toute personne qui est partie prenante croit que nous avons besoin de soins centrés sur les patients. Aucune discussion là-dessus.«La question, c’est comment y arriver. Vous avez tout à coup cinq groupes différents qui interviennent de diverses façons pour parvenir à un objectif commun et des gouvernements qui attendent d’être appelés lorsque les personnes clés parties prenantes concerteront leurs actions.«Il était probablement déjà temps il y a quelques années. Il est définitivement temps à présent. Nous y parviendrons… mais nous devons maintenant commencer à nous mobiliser autour d’un objectif commun.»«L’argent constituera le problème principal pour les réformateurs qui vont de l’avant si nous ne faisons pas attention, a dit le Dr Alex Himmelfarb (Ph. D). Il n’existe pas de calendrier détaillé et complet concernant un changement qui transformera les choses», a ajouté le directeur de l’École des affaires publiques et internationales de Glendon à l’Université York et ancien greffier du Conseil privé du Canada.«Ottawa a perdu toute prétention importante à diriger la réforme car les coupures ont forcé le système à se focaliser plus sur sa survie que sur des réformes, a-t-il relevé.«Étant donné le statut d’idole du système de santé, il n’y a pas la volonté politique de recommander une réforme. Il s’agit en vérité d’une démarche politique très délicate.«L’empressement à réformer est pourtant plus grand maintenant, puisque nous n’en avons pas pour notre argent et que les gestionnaires des services de santé laissent entendre qu’il faut dépenser plus. Si nous ne commençons pas maintenant à réformer le système, il continuera à s’éroder et en fin de compte s’arrêtera de fonctionner. Mais le sens de la pérennité dépend de votre situation.»Les deux conférenciers ont abordé les défis auxquels devra s’attaquer le gouvernement pour rendre le système viable.Lors d’une autre conférence qui a eu lieu ultérieurement, le secrétaire général de l’AMC, Paul-Émile Cloutier, a aussi abordé le danger que représenterait l’autosatisfaction d’Ottawa concernant les soins de santé puisque l’Accord national sur la santé de 2004 qui garantissait au moins 6 % d’augmentations les réduira progressivement en 2014.«Nous ne devons jamais permettre aux gouvernements d’échapper à leur responsabilité solennelle d’assurer des soins de qualité pour les Canadiens d’aujourd’hui et de demain», a affirmé M. Cloutier.Les patients ne sont pas toujours la préoccupation centrale du système de santé, a admis le Dr Kitts.«Les besoins des patients et ceux des prestataires de services ne s’entrecroisent pas toujours, a-t-il expliqué. Le système n’est pas câblé pour travailler en équipes, il est axé sur les fournisseurs. Il manque de résultats précis, fiables et opportuns et de données sur les coûts.«Finalement, les communications avec les patients sont insondables. Leur réussite repose sur l’électronique… Le fait que nous ne sommes pas d’accord enrichit les gouvernements.»«Ottawa veut contenir le coût des transferts en matière de santé aux provinces, alors que les provinces travaillent aussi à restreindre leurs propres dépenses en matière de santé, a relevé le Dr Himmelfarb. Pendant ce temps, les patients comptent sur le système pour ce qui est de la qualité et de l’opportunité des soins, alors que les médecins clament leurs besoins en instruments, produits et ressources appropriés.«Comment réconcilier tout cela? a-t-il demandé aux délégués pendant sa conférence. Le fait qu’il y ait plus de retards dans les fichiers m’inquiète.«Nous avons besoin d’un consensus national sur ce que contient la réforme et, franchement, pendant que les médecins doivent savoir ce qu’ils veulent dire par viabilité, ces sortes de choses dépassent ce que l’AMC peut faire.»

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